Tout est parti d’un constat et d’une question qui me taraude depuis quelque temps…
Mon constat est le suivant : il est difficile, à la lecture d’un mot, d’en deviner la prononciation. Il en est d’ailleurs certains qui, sans contexte, pourraient tout aussi bien se prononcer de deux manières différentes ; on parle ici d’homographie. De même, il est tout aussi difficile, à l’énoncé d’un mot, d’en deviner la graphie ; on parle alors d’homophonie.
— Et la question ? » me direz-vous.
N’ayant aucune formation littéraire, et encore moins linguistique, la question que je me pose à chaque fois que j’ouvre un dictionnaire est :
Comment diantre est-on censé lire cette prose absconse accolée à chaque mot du dictionnaire et qui, si j’avais quelque notion de ce qu’est l’Alphabet Phonétique International (API), m’aiderait à en comprendre la prononciation !?
Alors je me suis essayé à un petit jeu : concevoir une orthographe phonologique de la langue française. Et c’est en m’aidant de l’API pour énumérer l’ensemble des phonèmes — et des graphèmes qui leur sont liés — qu’ont vu le jour Akarlãg et Akarlahg.
Pour ce faire, je me suis imposé quelques règles.
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Premièrement, à chaque symbole correspondra un unique phonème, et pour chaque phonème, un seul symbole lui correspondra ;
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Deuxièmement, la graphie devra rester aussi proche de l’orthographe standard de la langue française que faire se peut ;
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Enfin, devront être gérés les liaisons et les accords de nombre.
La langue française dispose finalement de peu de phonèmes au regard de la multitude recensée. On en distinguera 37 en tout et pour tout pour la prononciation du français de France. Cette liste s’allonge si l’on considère le français québécois, de Belgique ou de Suisse.
On distingue en français 12 voyelles, auxquelles s’en ajoutent 4 autres par nasalisation : /ɔ̃/ (on), /ɛ̃/ (brin), /œ̃/ (brun) et /ɑ̃/ (an).
Les consonnes de la langue française sont quant à elles au nombre de 20, auxquelles s’ajoutent la consonne pulmonique /ɥ/.
Deux lettres de l’alphabet latin ne sont utilisées ici que pour la réalisation de digrammes permettant l’écriture sans diacritiques. Il s’agit du h et du q. La première étant utilisée dans le cas de digrammes sur la base de voyelles, et la seconde pour ceux basés sur des consonnes.
Toujours pour permettre l’écriture sans diacritiques, Akarlahg fait usage des caractères " et - en fin de mots pour symboliser les liaisons en [z] et en [t] ; les liaisons en [n] ne sont pas représentées. Akarlãg, pour sa part, utilisera respectivement les diacritiques souscrits ̧ (U+0327), ̝ (U+031D) et ̰ (U+0330) pour symboliser ces mêmes liaisons.
Une troisième variante est proposée. Elle est assez différente des deux premières en ce sens qu’elle se propose d’être une réforme de l’orthographe par simplification itérative des règles qui la compose. Voici les propositions sur lesquelles elle repose :
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Suppression des doubles consonnes
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Simplification des -bb-, -dd-, -pp-, -ff-, -gg-
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Remplacement du -zz- par -z-, -dz- ou -ts-
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Simplification des -mm-, -nn-, -rr-, -ll-, -cc- lorsqu’ils ne correspondent pas à une pronnonciation différente.
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Compromis: maintien du -ss-
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Simplification des ph, th, ch, kh, y, h grecs
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Supprimer purement et simplement la marque du pluriel
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Suppression des flexions inaudibles
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Simplifier les orthograhes -aon, -ein, etc.
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les -aon- deviennent -an- ou -on-
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les -ein- deviennent -in-
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les -ain- deviennent -in-
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les -aim- deviennent -in-
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Compromis : maintien du -un- (prononcé dans certaines régions)
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Simplifier les [s]
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les -tion- deviennent des -cion-
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les formes -sc-, -sç-, -x-, -z- disparaissent
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Réformer le -qu- / -gu-
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les -qu- deviennent des -c- devant (a|o|u) ou des -q- devant (e|i|y)
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les mots en -que deviennent des -q
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les -gu- deviennent des -g- devant (a|o|u)
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mettre un tréma sur le -ü- quand le -qu- se pronnonce [kw]
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Compromis : exception faite des pronoms en qu-
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Supprimer le circonflexe quand il est purement étymologique ou homonymique
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Simplifier les trémas, -ill-, -y-, -h-
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positionner le trémas sur la lettre prononcée
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les -ill- deviennent -y-
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généraliser le -y- comme son [j] uniquement
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Supprimer les consonnes muettes internes et finales
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Harmoniser les mots en [ɑ̃]
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les [ɑ̃] finaux deviennent -an
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les [ɑ̃] internes deviennent -en
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Un petit utilitaire en ligne de commande est disponible pour transcrire un texte en Akarlãg ou en Akarlahg depuis la notation alphabétique phonétique internationale. Et inversement.
❯./bin/akarlahg --help
Usage: bin/akarlahg [options] string
-f, --from=SRC Convert text from SRC (ipa, utf8, latin)
-t, --to=DEST Convert text to DEST (ipa, utf8, latin)
-h, --help Prints this help
❯ bin/akarlahg -f ipa -t utf8 "dɛ nɔɛl u œ̃ zefiʁ aj mə vɛ də ɡlasɔ̃ vyʁmjɛ̃ ʒə din dɛkski ʁoti də bœf o kiʁ a lˈaj dˈaʒ myʁ et seteʁa"
dè noèl ů ũ zéfir ȧ me vè de glasõ vurmyũ je din dèxki rôti de bœf ô kir a lȧ daj mur ét sétéra
❯ bin/akarlahg -f ipa -t latin "dɛ nɔɛl u œ̃ zefiʁ aj mə vɛ də ɡlasɔ̃ vyʁmjɛ̃ ʒə din dɛkski ʁoti də bœf o kiʁ a lˈaj dˈaʒ myʁ et seteʁa"
dhe nohel hu uh zehfir ay me vhe de glasoh vurmyuh je din dhekski roti de bef o kir a lay daj mur eht sehtehra
Note
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Ce script n’en est qu’à ses balbutiements. Il ne permet pas la transcription depuis (ni vers) un texte orthographié de façon standard. Il ne gère correctement ni les liaisons, ni les pluriels. |